mardi 2 janvier 2007

D’ici et d’ailleurs

Clin d’œil

Albert Einstein : « Si un bureau désordonné est le signe d’un esprit désordonné, qu’en est-il alors du bureau vide? »

D’ici et d’ailleurs

La lecture de la revue L’Histoire de décembre dernier m’a suscité quelques réflexions.

Des mouvements sociaux d’ici (et même politiques depuis peu) entretiennent une pression sur les divers paliers de gouvernements pour un accroissement considérable du parc immobilier destiné aux moins nantis.

Bien que la situation soit moins cruciale chez-nous qu’ailleurs, elle demeure importante. Et il y a lieu d’entrevoir, à la lumière de l’histoire récente, comment une situation qui perdure peut dégénérer en crise sociale majeure, comme il s’est produit en France à l’automne 2005.

Lors de la Guerre de 39-45, 460 000 immeubles avaient été détruits et 1,9 millions endommagés, créant un problème d’envergure d’ordre social mais également d’ordre sanitaire.

En effet, dès 1946 le programme de reconstruction nationale devait prendre en compte, dans les démarches de reconstruction, de l’absence généralisée d’infrastructures sanitaires en milieu urbain (vieilles cités) et même en nouveau territoire (aqueducs et égouts).

À la fin du programme en 1954, la moitié des logis anciens ne possédaient ni sanitaires ni W.C. intérieurs et plus de la moitié n’avaient même pas l’eau courante selon le recensement 1954.

Pour faire face aux besoins aigus, au début des années 1950 on construisait 100 000 logements par an, et ce fut 300 000 en 1958. Dans les années 1970, c’était 550 000 par an. C’est ainsi que le parc immobilier s’est accru de 8 millions de logements de 1953 à 1975.

D’environ 500 000 logis sociaux (HBM : Habitations à Bon Marché) en 1946, on était passé à 3 millions en 1986, dont un grand nombre n’offraient que l’eau courante.

Avec l’abandon des anciennes colonies, le retour des ressortissants français au pays et l’avalanche d’immigrants de toutes provenances et de toutes catégories, les grandes municipalités et particulièrement Paris ont vu se multiplier les bidonvilles. Les nouveaux arrivants en recherche d’amélioration de leur sort s’accommodaient des vieux logis insalubres et les surpeuplaient ou en se construisaient des bicoques sur des terrains squattés.

La situation économique des résidents des nouvelles habitations (majoritairement des ouvriers, des collets blancs et de petits et moyens cadres) s’améliorant avec le boom économique, leur place fut prise par une majorité d’immigrants légaux ou non.

Comme un grand nombre de ces constructions (les barres — de grandes boîtes multi-logements de forme rectangulaire allongée — et les tours) élevées à la hâte n’offraient pas de services de proximité d’aucune sorte, à l’exception de quelques rares petites écoles, un ferment subversif se fit jour peu à peu qui explosa en 2005 avec les conséquences que nous avons sues.

Nous n’en sommes pas là, heureusement, mais l’élargissement continu et croissant du fossé entre les riches et les pauvres de notre pays, de notre province, devrait attirer l’attention de nos dirigeants sur cette leçon de l’histoire récente afin d’éviter que le même phénomène se produise chez-nous.

Ne répétons-nous pas à satiété à propos de tout qu’ « il vaut mieux prévenir que guérir »?

L’histoire des Québécois de souche nous montre que ce peuple a une capacité étonnante d’endurer. Mais ne constatons-nous pas que ce peuple devient peu à peu minoritaire?

D’autres influences s’exercent et s’accroissent dans notre société lancée dans un mouvement irrépressible.

Les décideurs-trésoriers de notre société devraient prendre garde.